En été, de nombreuses espèces de papillons nous accompagnent joyeusement durant nos virées dans des montagnes qui se déclinent en arcs-en-ciel fleuris.
Lorsque le soir tombe, on pourrait imaginer que le spectacle est terminé. Ce serait sans compter sur les papillons de nuit beaucoup plus discrets mais tout aussi remarquables que ceux qui dansent sous les rayons du soleil. L’un d’eux, le Saturnia pyri, est extraordinaire. Avec une envergure comprise entre 110 et 150 mm, c’est le plus grand des papillons européens. Outre un corps charnu, couvert de velours marron, des antennes pectinées (en forme de peigne), des pattes velues et des yeux foncés, les ailes nuancées de brun et de gris qu’il étale au repos sont parcourues d’un zigzag pâle et ourlées d’une bande claire, bien visible, très douce. Pour reprendre les termes de J-H. Fabre, sur chacune d’elles, « un grand œil à prunelle noire et iris varié, où se groupent en arc, le noir, le blanc, le châtain et le rouge amarante" évoque les ocelles qui ornent les ailes du paon. Cette particularité est d’ailleurs à l’origine de son nom.
Comme beaucoup d’espèces nocturnes, le Grand Paon n’a pas de trompe et ne s’alimente pas. De ce fait, sa durée de vie n’excédant pas une courte semaine, celle-ci est essentiellement consacrée à la reproduction. Pour affrioler le séducteur qu’elle attend, la femelle lui envoie des phéromones sexuelles qu’il capte grâce à de puissants détecteurs d’odeurs situés dans ses antennes. Il localise ainsi sa partenaire même si elle se trouve à plusieurs kilomètres de distance. L’abdomen de la femelle est bientôt bourré d’œufs, environ 200. Pas avare dans la distribution, le copain ! La pauvre n’a qu’un souci, s’alléger au plus vite en déposant de petits tas fécondés sur des branchettes d’arbres fruitiers ou forestiers et autres plantes-hôtes qu’elle atteint à la force de ses pattes.
D’abord noire avec des bandes rouges, la chenille, spectaculaire, se colore d’un joli vert jaune fluo aux tubercules bleu-turquoise portant des soies raides. Pouvant mesurer de 120 mm à 150 mm, elle accumulera l’énergie nécessaire à la perpétuation de l’espèce. A maturité, la chenille tissera un gros cocon pour achever sa métamorphose. Formé de fils entrecroisés, entre des feuilles repliées à l’intersection de branches ou sur le bas d’un tronc, il est extrêmement léger (moins de 2 gr) résistant, solide, flexible et imperméable. L’émergence a souvent lieu au printemps de l’année suivante mais il arrive que la chrysalide reste au repos plus longtemps.